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Citations

« Progrès technique et progrès social sont en connexion étroite, et l’un et l’autre sont babyloniens ; ils se soutiennent et s’entravent réciproquement, et s’équilibrent. Rétrospectivement, il est difficile de trancher la question : lequel des deux a provoqué les pires dévastations ? »

— Ernst Jünger, Eumeswil (1977), trad. Henri Plard, éd. Gallimard/La Table ronde, coll. « Folio », 1998, p. 460-461


« J’ai étudié au luminar la révolte des Blancs en Vendée. Cette guerre est curieuse, relique de l’âge gothique. Elle est menée par les trois états primitifs de l’humanité : chevaliers, paysans et prêtres. Le rapport au roi est encore personnel et intact. Les Républicains sont mieux armés et ont, de beaucoup, l’avantage du nombre.

Telle est la situation classique qui amène le Recours aux forêts, tel qu’il fut encore, par exemple, pratiqué contre Léviathan, deux cents années plus tard, mais, il est vrai, dans les marais et les fourrés des tropiques. En Bretagne, la forêt était réduite à un labyrinthe de haies. C’est sous leur couvert que les chouans suivaient à la piste les régiments en marche sur les routes et les effrayaient en échangeant leurs appels. [...]

La révolte de Vendée était, quant au temps, plus tardive, mais morphologiquement plus ancienne... elle était encore gothique ; les trois ordres des origines, les chevaliers, les paysans et les prêtres y luttaient unis. »

— Ernst Jünger, Eumeswil (1977), trad. Henri Plard, éd. Gallimard/La Table ronde, coll. « Folio », 1998, p. 353-424


« L’illusion égalitaire des démagogues est encore plus dangereuse que la brutalité des traîneurs de sabre... »

— Ernst Jünger, Eumeswil (1977), trad. Henri Plard, éd. Gallimard/La Table ronde, coll. « Folio », 1998, p. 262


« Le recours aux forêts demeure possible, lors même que toutes les forêts ont disparu, pour ceux-là qui cachent en eux des forêts. »

— Ernst Jünger, Graffiti (1960), trad. Henri Plard, éd. 10/18, 1997, p. 179


« Le mot “conservateur” ne fait pas partie des vocables les plus heureux. Il recèle un caractère axé sur le temps et se propose de restaurer des formes et des situations devenues impossibles à maintenir. Aujourd’hui, le plus faible est a priori celui qui veut encore maintenir quelque chose. Voilà pourquoi il est bon de chercher à dissocier le mot de la tradition. Il s’agit plutôt de trouver, voire de retrouver ce qui fut et sera de tout temps à la base d’un ordre sain. Mais c’est là quelque chose d’extratemporel, auquel nulle régression ni progression ne mène. Les divers mouvements ne font que tourner autour. Seuls changent les moyen et les noms. En ce sens, il convient d’approuver la définition d’Albrecht Günther qui comprend pas l’esprit conservateur comme un “attachement à ce qui fut hier, mais comme une vie faite de ce qui à jamais valable”. Or seul peut être valable à jamais ce qui a été affranchi du temps. L’extratemporel revendique aussi son dû. Et alors, d’une façon néfaste, même quand on n’en tient pas compte. La volonté de maintenir ce qui est advenu inadmissible rend stérile la critique conservatrice qui est souvent alliée à la beauté et à l’acuité spirituelle. On pénètre dans les palais à demi écroulés, devenus inhabitables. »

— Ernst Jünger, Rivarol et autres essais (1956), trad. Jeanne Naujac et Louis Eze, éd. Grasset, 1974, p. 66


« Si l’art des chasseurs des premiers âges nous émeut tant et nous parle un langage plus fort que celui de l’Orient ancien ou même récent, c’est sans doute un signe qu’y vivent l’esprit de notre esprit, la liberté de notre liberté. »

— Ernst Jünger, Le Nœud gordien (1953), trad. Henri Plard, éd. Christian Bourgois, 1981, p. 


L’homme « d’âge moyen élevé, vacciné, revacciné, débarrassé de ses microbes, habitué aux médicaments, a moins de chances d’en sortir qu’un autre qui ne sait rien de tous ces remèdes. La basse mortalité des époques paisibles ne donne pas la mesure de la santé véritable ; elle peut, d’un jour à l’autre, faire place à son contraire. Il se peut même qu’elle provoque des maladies encore inconnues. Le tissu des peuples devient fragile. »

— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 549


« La forêt est secrète. Le mot est l’un de ceux, dans notre langage, qui recèlent ses contradictions. Le secret, c’est l’intime, le foyer bien clos, la citadelle de sécurité. Mais c’est aussi le clandestin, et ce sens le rapproche de l’insolite, de l’équivoque. Quand nous rencontrons de telles racines, nous pouvons être sûrs qu’elles trahissent la grande antithèse et l’identité, plus grande encore, de la vie et de la mort, que les mystères s’attachent à déchiffrer. »

— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 528-529


« On ne revient pas en arrière pour reconquérir le mythe ; on le rencontre à nouveau, quand le temps tremble jusqu’en ses bases, sous l’empire de l’extrême danger. »

— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 519


« Deux qualités sont donc indispensables au rebelle. Il refuse de se laisser prescrire sa loi par les pouvoirs, qu’ils usent de la propagande ou de la violence. Et il est décidé à se défendre [...]. »

— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 516


« À supposer même que l’anéantissement triomphe sous la pire de ses formes, une différence subsiste alors, aussi radicale que celle du jour et de la nuit. D’un côté, le chemin s’élève vers des royaumes, le sacrifice de la vie, ou le destin du combattant qui succombe sans lâcher ses armes ; de l’autre, il descend vers les bas-fonds des camps d’esclavage et des abattoirs où les primitifs concluent avec la technique une alliance meurtrière ; où l’on n’est plus un destin, mais rien qu’un numéro de plus. Or avoir son destin propre, ou se laisser traiter comme un numéro : tel est le dilemme que chacun, certes, doit résoudre de nos jours, mais est seul à pouvoir trancher. »

— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 513


« Quant au rebelle, nous appelons ainsi celui qui, isolé et privé de sa patrie par la marche de l’univers, se voit enfin livré à l’anéantissement. Tel pourrait être le destin d’un grand nombre d’hommes, et même de tous — il faut donc qu’un autre caractère s’y ajoute. C’est que le rebelle est résolu à la résistance et forme le dessein d’engager la lutte, fût-elle sans espoir. Est rebelle, par conséquent, quiconque est mis par la loi de sa nature en rapport avec la liberté, relation qui l’entraîne dans le temps à une révolte contre l’automatisme et à un refus d’en admettre la conséquence éthique, le fatalisme. »

— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 507


« Tout confort se paie. La condition d’animal domestique entraîne celle de bête de boucherie. »

— Ernst Jünger, « Traité du rebelle » (1951), dans Essais, trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 506


« Tout État se doit de créer une utopie, dès qu’il a perdu le contact avec le mythe. »

— Ernst Jünger, Héliopolis (1949), trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 1988, p. 221


« Nous pouvons nous dérober, mais c’est précisément la raison pour laquelle nous avons, moins que personne, le droit de penser aux canots de sauvetage. Nous n’avons pas seulement un héritage, mais aussi une mission. »

— Ernst Jünger, Héliopolis (1949), trad. Henri Plard, éd. Le Livre de poche, 1988, p. 93-94


« Qu’il suffise d’indiquer qu’entre le nihilisme amené à sa perfection, et l’anarchie sans frein, l’opposition est profonde. Il s’agit de savoir, dans ce combat, ce que le séjour des hommes doit devenir, un désert ou une forêt vierge. »

— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2005, p. 118


« Quand le sentiment du droit et du bien s’évanouit, quand l’épouvante trouble les sens, alors les forces de l’homme de la rue sont bientôt taries. Mais chez la vieille aristocratie le sens de ce qui est vrai et légitime demeure vivant et c’est d’elle que sortent les nouveaux rejetons de l’esprit d’équité. Il n’est pas d’autre raison à la prééminence accordée chez tous les peuples au sang noble. »

— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2005, p. 116


« On remarquait en lui le trait de la grandeur héréditaire, et ce trait contraire aussi que la terre imprime sur tout héritage — car l’héritage est la richesse des morts. »

— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2005, p. 115


« Nous aussi nous sentîmes alors la puissance de l’instinct passer en nous comme un éclair. [...]

Nous ne savions pas encore de quel immense pouvoir l’homme est dépositaire. »

— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2005, p. 84-85


« Mais que faire, si les faibles méconnaissent la loi, et dans leur aveuglement tirent les verrous qui n’étaient poussés que pour les protéger ? [...] L’ordre humain ressemble au Cosmos en ceci, que de temps en temps, pour renaître à neuf, il lui faut plonger dans la flamme. »

— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2005, p. 71


« Profonde est la haine qui brûle contre la beauté dans les cœurs abjects. »

— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2005, p. 62


« Comme toujours là où le doute s’accompagne de plénitude, nous fîmes confiance à la force, et n’est-elle pas l’éternel balancier qui pousse en avant les aiguilles, indifférente au jour et à la nuit ? »

— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2005, p. 36


« Il est des temps de décadence, où s’efface la forme en laquelle notre vie profonde doit s’accomplir. Arrivés dans de telles époques, nous vacillons et trébuchons comme des êtres à qui manque l’équilibre. Nous tombons de la joie obscure à la douleur obscure, le sentiment d’un manque infini nous fait voir pleins d’attraits l’avenir et le passé. Nous vivons ainsi dans des temps écoulés ou dans des utopies lointaines, cependant que l’instant s’enfuit. »

— Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre (1939), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2005, p. 35


« L’ordre propre à la démocratie nationale tend à un état d’anarchie mondiale dans la mesure même où il gagne en universalité. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 333


« Le Travailleur se distingue par un nouveau rapport à l’élémentaire. Il dispose donc de réserves plus considérables que le bourgeois qui reconnaît la sécurité comme valeur suprême et se sert de sa raison abstraite comme d’un moyen destiné à assurer cette sécurité. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 330


« C’est seulement lorsque la démocratie est réalisée que la tendance dissolvante de ses principes moteurs ressort dans toute sa virulence. C’est alors seulement qu’on voit combien le monde bourgeois vivait de sentiments reflétés et combien il relevait d’un réflexe de défense. Les principes de ce monde changent de sens lorsqu’on les prive d’adversaire. La dissolution a atteint ses dernières limites lorsqu’elle n’est plus confrontée aux vestiges de l’autorité mais à sa propre image reflétée dans tous les miroirs. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 287


« [...] la société bourgeoise [...] s’est hissée au rang d’exploiteuse de l’État. Le visage de la démocratie tardive où la trahison et l’impuissance ont gravé leur marque est par trop connu. Dans cette atmosphère, toutes les puissances de décomposition, tous les éléments moribonds, étrangers et hostiles ont merveilleusement prospéré ; leur but secret est de l’éterniser à tout prix. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 275-276


« Dans l’espace libéral, l’idéal n’est pas la suprématie ouverte mais la suprématie masquée et, corrélativement, l’esclavage masqué ; c’est le concurrent le plus faible qui garantie la situation générale [...]. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 229


« La technique n’est pourtant, comme nous l’avons vu, aucunement un instrument de progrès mais un moyen de mobiliser le monde grâce à la Figure du Travailleur, et tant que ce processus est en cours, il est possible de prédire avec certitude qu’on ne renoncera à aucune de ses propriétés dévastatrices. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 225-226


« Partout où l’homme tombe sous la coupe de la technique, il se voit placé devant une alternative inéluctable. Il s’agit pour lui d’accepter ses moyens particuliers et de parler sa langue ou de périr. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 202


« L’adoption d’une technique étrangère est un acte de soumission dont les conséquences sont d’autant plus dangereuses qu’il s’accomplit d’abord en esprit. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 122


« À l’âge de la Domination apparente de la bourgeoisie, on ne peut plus ou on ne peut pas encore parler de puissance. La mise en pièces de l’État absolutiste par les principes universels apparaît comme un acte grandiose d’affaiblissement et de dévalorisation d’un monde accompli dans sa forme. Vu sous une autre perspective, ce nivellement de toutes les frontières se présente pourtant comme un acte de mobilisation totale, comme la préparation de la Domination de grandeurs nouvelles et d’une nature différente dont l’entrée en scène ne se fera pas attendre. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 118


« [...] l’état de sécurité idéal auquel le progrès s’efforce de parvenir consiste dans une Domination mondiale de la raison bourgeoise qui voudrait non seulement réduire les sources du danger mais les amener finalement à se tarir. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 99


« Tous les grands moments de la vie, les rêves ardents de la jeunesse, l’enivrement de l’amour, le feu de la bataille, coïncident avec une conscience plus profonde de la Figure, et le souvenir est le retour magique de la Figure qui émeut le cœur et le persuade du caractère impérissable des ces moments. Le désespoir le plus amer d’une vie consiste à ne s’être pas accompli, à n’avoir pas été à la hauteur de soi-même. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 86


« [...] désormais le triomphe de la société sur l’État s’est manifesté sans équivoque comme une combinaison ininterrompue de haute trahison et de trahison envers la patrie, perpétrées par le vulgaire, trop vulgaire, à l’encontre de tout ce qui constitue le fond allemand. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 76


« Est société l’ensemble de la population du globe qui s’offre au concept comme l’image idéale d’une humanité dont la division en États, nations ou races ne repose au fond sur rien d’autre que sur une erreur de raisonnement. Cette erreur de raisonnement sera cependant corrigée au fil du temps par des contrats, par les “lumières”, par une moralisation générale, ou tout simplement par le progrès des moyens de transport. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 72


« [...] les étroits rapports qui règnent entre la fraternité et l’échafaud, entre les droits de l’homme et les batailles meurtrières ne sont que trop connus. »

— Ernst Jünger, « Le Travailleur » (1932), dans Essais, trad. Julien Hervier, éd. Le Livre de poche, 2019 (ISBN 9782253186557), p. 69


« [...] les guerres dévastatrices sont les portes les mieux faites pour entrer dans des zones décisives de l’âme, et pour laquelle, lors des nouveaux déploiements de l’image du monde, lors des révolutions, la donnée brutale du sang qui coule est plus bouleversante et plus féconde que tout bouleversement spirituel. »

— Ernst Jünger, Le Cœur aventureux (1929), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 1979, p. 161


« Aujourd’hui on ne peut pas travailler en société [...] ; il faut le faire dans la solitude, comme un homme qui ouvre une brèche dans la forêt vierge, soutenu par l’unique espoir que, quelque part, dans les fourrés d’autres travaillent à la même œuvre. »

— Ernst Jünger, Le Cœur aventureux (1929), trad. Henri Thomas, éd. Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 1979, p. 


« Quand nous escaladerons la barricade, ce ne sera point pour la lutte des classes, mais pour des biens immatériels. Un abîme nous sépare de ceux qui se battent pour un bien-être matériel. »

— Ernst Jünger, Le Boqueteau 125 (1924), trad. Théodore Lacaze, éd. Payot, 1998, p. 172


« C’est l’épreuve de la guerre qui fait voir si l’harmonie existe au sein d’une nation. Dans la concurrence économique et dans toutes les compétitions menées au moyen de ces armes spirituelles de mode aujourd’hui, l’énergie apparente peut dissimuler la plus grande légèreté, la corruption, l’arbitraire ; mais dans la guerre, ces points faibles ne tardent pas à se manifester. La sélection passe de l’individu à l’ensemble de l’État et la meilleure preuve en est que c’est à la conservation des individus les plus précieux qu’on finit par attacher le moins d’importance. »

— Ernst Jünger, Le Boqueteau 125 (1924), trad. Théodore Lacaze, éd. Payot, 1998, p. 162-163


« Je hais la démocratie comme la peste [...]. »

— Ernst Jünger, Le Boqueteau 125 (1924), trad. Théodore Lacaze, éd. Payot, 1998, p. 81


« Le nombre sera peut-être petit de ceux qui reviendront de ces plaines d’enfer où nulle protection ne s’offre plus à l’homme sauf le métal dur qu’il porte en lui-même en son cœur [...]. »

— Ernst Jünger, Le Boqueteau 125 (1924), trad. Théodore Lacaze, éd. Payot, 1998, p. 30


« [...] même le plus colossal affrontement n’est jamais que la balance où l’on pèse, aujourd’hui comme toujours, le poids des hommes. »

— Ernst Jünger, Orages d’acier (1920), trad. Christian Bourgois (revue par Henri Plard), éd. Christian Bourgois, 1970, p. 349


« Ce fut la première fois où je vis à l’œuvre la destruction préméditée, systématique, que j’allais rencontrer jusqu’à l’écœurement dans les années suivantes ; elle est en corrélation étroite avec les doctrines économiques de notre temps et rapporte au destructeur lui-même plus de tort que de profit. Les villages auraient été de toute manière anéantis dans les combats qui suivirent, mais d’une manière plus digne du soldat. »

— Ernst Jünger, Orages d’acier (1920), trad. Christian Bourgois (revue par Henri Plard), éd. Christian Bourgois, 1970, p. 169


« Nous savions que cette fois, nous allions entrer dans une bataille telle que le monde n’en avait encore jamais vu. »

— Ernst Jünger, Orages d’acier (1920), trad. Christian Bourgois (revue par Henri Plard), éd. Christian Bourgois, 1970, p. 120


« Élevés dans une ère de sécurité, nous avions tous la nostalgie de l’inhabituel, des grands périls. La guerre nous avait donc saisis comme une ivresse. C’est sous une pluie de fleurs que nous étions partis, grisés de roses et de sang. Nul doute que la guerre ne nous offrît la grandeur, la force, la gravité. Elle nous apparaissait comme l’action virile : de joyeux combats de tirailleurs, dans les prés où le sang tombait en rosée sur les fleurs. Pas de plus belle mort au monde... Ah ! surtout, ne pas rester chez soi, être admis à cette communion ! »

— Ernst Jünger, Orages d’acier (1920), trad. Christian Bourgois (revue par Henri Plard), éd. Christian Bourgois, 1970, p. 9-10
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Werner Heisenberg, Ernst Jünger et Martin Heidegger
Ernst Jünger et Carl Schmitt, Rambouillet, octobre 1941
Ernst von Salomon et Ernst Jünger à Winsen en Allemagne dans les années 1950
Ernst Jünger et Alain de Benoist, Nice, 15 mai 1977
Carl Schmitt et Ernst Jünger, Plettenberg, 1978

Bibliographie

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