Différences entre les versions de « Karl Popper »
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− | « Du fait même de la perte de son caractère organique, une société ouverte risque de s’acheminer progressivement vers une "société abstraite". Elle peut en effet cesser, dans une large mesure, d’être un véritable rassemblement d’individus. Imaginons, au prix d’une certaine exagération, une société où les hommes ne se rencontrent jamais face à face, où les affaires sont traitées par des individus isolés communiquant entre eux par lettres ou par télégrammes, se déplaçant en voiture fermée et se reproduisant par insémination artificielle : pareille société serait totalement abstraite et dépersonnalisée. Or, la société moderne lui ressemble déjà sur bien des points. Dans une ville, les piétons se croisent mais s’ignorent, les membres d’un syndicat portent une carte et paient une cotisation mais peuvent ne jamais se connaître. Beaucoup d’individus ont peu ou pas de contacts humains et vivent dans l’anonymat et l’isolement. Il y sont malheureux, car, si la société tend à devenir abstraite, le tissu biologique de l'homme n'a guère changé, et il a des besoins sociaux que celle-ci est incapable de satisfaire. » | + | « '''Du fait même de la perte de son caractère organique, une société ouverte risque de s’acheminer progressivement vers une "société abstraite". Elle peut en effet cesser, dans une large mesure, d’être un véritable rassemblement d’individus.''' Imaginons, au prix d’une certaine exagération, une société où les hommes ne se rencontrent jamais face à face, où les affaires sont traitées par des individus isolés communiquant entre eux par lettres ou par télégrammes, se déplaçant en voiture fermée et se reproduisant par insémination artificielle : pareille société serait totalement abstraite et dépersonnalisée. Or, la société moderne lui ressemble déjà sur bien des points. Dans une ville, les piétons se croisent mais s’ignorent, les membres d’un syndicat portent une carte et paient une cotisation mais peuvent ne jamais se connaître. Beaucoup d’individus ont peu ou pas de contacts humains et vivent dans l’anonymat et l’isolement. Il y sont malheureux, car, si la société tend à devenir abstraite, le tissu biologique de l'homme n'a guère changé, et il a des besoins sociaux que celle-ci est incapable de satisfaire. » |
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|auteur=Karl Popper | |auteur=Karl Popper |
Version du 9 mai 2017 à 14:14
Citationes
« Du fait même de la perte de son caractère organique, une société ouverte risque de s’acheminer progressivement vers une "société abstraite". Elle peut en effet cesser, dans une large mesure, d’être un véritable rassemblement d’individus. Imaginons, au prix d’une certaine exagération, une société où les hommes ne se rencontrent jamais face à face, où les affaires sont traitées par des individus isolés communiquant entre eux par lettres ou par télégrammes, se déplaçant en voiture fermée et se reproduisant par insémination artificielle : pareille société serait totalement abstraite et dépersonnalisée. Or, la société moderne lui ressemble déjà sur bien des points. Dans une ville, les piétons se croisent mais s’ignorent, les membres d’un syndicat portent une carte et paient une cotisation mais peuvent ne jamais se connaître. Beaucoup d’individus ont peu ou pas de contacts humains et vivent dans l’anonymat et l’isolement. Il y sont malheureux, car, si la société tend à devenir abstraite, le tissu biologique de l'homme n'a guère changé, et il a des besoins sociaux que celle-ci est incapable de satisfaire. »
« La confusion de l'individualisme avec l'égoïsme permet de le condamner au nom des sentiments humanistes et d'invoquer ces mêmes sentiments pour défendre le collectivisme. En fait, en attaquant l'égoïsme, ce sont les droits de l'individu qu'on vise. »
« [...] les principaux courants d'idées du totalitarisme moderne sont un héritage direct de Hegel. »
« Qu'il existe entre les hommes des inégalité de fait n'est pas niable, et on peut même se demander si, à certains égards, ces inégalités ne sont pas souhaitables. »
« Qu'est-ce donc un mythe, sinon une tentative de rationalisation de l'irrationnel ? »
« La civilisation occidentale doit, en effet, son fondement rationaliste, sa croyance en l’unité rationnelle de l’homme au sein d’une société ouverte, et plus spécialement son attitude scientifique, à l’antique foi socratique et chrétienne. »
« Les hommes ne sont pas égaux, mais nous pouvons décider de combattre pour l'égalité des droits. »
« Je n'ignore rien des difficultés et des dangers inhérents à la démocratie, mais je n'en pense pas moins qu'elle est notre seul espoir. Bien des exemples montrent que cet espoir n'est pas vain. »
« Il existe — et c’est éclairant — une thèse opposée, que j’appellerai la thèse du complot, selon laquelle il suffirait, pour expliquer un phénomène social, de découvrir ceux qui ont intérêt à ce qu’il se produise. Elle part de l’idée erronée que tout ce qui se passe dans une société, guerre, chômage, pénurie, pauvreté, etc., résulte directement des desseins d’individus ou de groupes puissants. Idée très répandue et fort ancienne, dont découle l’historicisme ; c’est, sous sa forme moderne, la sécularisation des superstitions religieuses. Les dieux d’Homère, dont les complots expliquent la guerre de Troie, y sont remplacés par les monopoles, les capitalistes ou les impérialistes. »
« Les adversaires de la liberté ont toujours cherché à tirer parti des sentiments prévalents, plutôt que de gaspiller leurs forces à essayer de les détruire. Bien souvent, les idées les plus chères aux humanistes ont été chaleureusement louées par leurs pires ennemis, qui, se faisant passer pour leurs alliés, ont semé la désunion et la confusion parmi eux. Ils y ont si bien réussi que nombre d'humanistes sincères continuent à vénérer l'idée platonicienne de la justice, l'idée médiévale de l'autoritarisme chrétien, l'idée rousseauiste de "volonté générale" ou les idées de Fichte et de Hegel sur la liberté nationale. Ce procédé, revenant à introduire dans le camp humaniste une cinquième colonne intellectuelle d'autant plus dangereuse qu'elle est en grande partie inconsciente, a surtout été efficace après que l'hégélianisme fut devenu le fondement d'un mouvement réellement humaniste : le marxisme, qui est la forme d'historicisme la plus pure, la plus répandue et la plus redoutable que le monde ait connue. »
« L'amour abstrait du prochain n'existe guère. On ne peut vraiment aimer que ceux qu'on connaît. C'est pourquoi l'appel à nos émotions, fussent-elles les plus élevées, nous amène toujours à répartir les humains en différentes catégories. Il en sera ainsi, à plus forte raison, si cet appel s'adresse à des sentiments moins nobles. En dernière analyse, notre réaction sera de classer les humains, en distinguant les membres de notre clan ou de notre communauté spirituelle et ceux qui n'y appartiennent pas, entre croyants et incroyants, concitoyens et étrangers, camarades et ennemis de classe, dirigeants et dirigés. »
« Substituer au gouvernement par la raison le gouvernement par l’amour, c’est ouvrir la voie au gouvernement par la haine, comme Socrate semble l’avoir entrevu quand il dit que la méfiance en la raison ressemble à la méfiance envers l’homme. L’amour n’est ni une garantie d’impartialité, ni un moyen d’éviter les conflits, car on peut différer sur la meilleure manière d’aimer, et plus l’amour est fort, plus fort sera le conflit. Cela ne veut pas dire que l’amour et la haine doivent être placés sur le même plan, mais seulement que nul sentiment, fût-ce l’amour, ne peut remplacer le recours à des institutions fondées sur la raison.
Le règne de l’amour présente d’autres dangers. Aimer son prochain, c’est vouloir le rendre heureux [...]. Mais vouloir le bonheur du peuple est, peut-être, le plus redoutable des idéaux politiques, car il aboutit fatalement à vouloir imposer aux autres une échelle de valeurs supérieures jugées nécessaires à ce bonheur. On verse ainsi dans l’utopie et le romantisme ; et, à vouloir créer le paradis terrestre, on se condamne inévitablement à l’enfer. De là l’intolérance, les guerres de religion, l’Inquisition, avec, à la base, une conception foncièrement erronée de nos devoirs. Que nous ayons le devoir d’aider ceux qui en ont besoin, nul ne le conteste ; mais vouloir le bonheur des autres, c’est trop souvent forcer leur intimité et attenter à leur indépendance. »
Citationes de Karl Popper
« Certains commettent l'erreur de confondre historicisme et historisme. Le venin et l'antidote. Ou Hegel et Ranke.
Historicisme ce dont parle Popper ; historicisme ce dont parle Meinecke. »