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« Autrefois la nature humaine n’était pas ce qu’elle est maintenant ; elle était bien différente. D’abord il y avait trois genres, et non deux comme maintenant, un mâle et une femelle ; s’y ajoutait un troisième genre qui participait des deux autres — dont l’appellation a subsisté — mais qui a lui-même disparu : il y avait un genre androgyne, dont l’aspect et le nom participait à la fois des deux autres [...]. Par ailleurs la forme de chaque homme était entièrement ronde, avec un dos arrondi et des côtes circulaires, avec quatre mains, autant de jambes et deux visages sur un cou d’une rondeur parfaitement régulière, mais une seule tête sous les deux visages regardant en sens opposés ; avec quatre oreilles, et deux sexes [...]. Ils étaient doués d’une force et d’une vigueur prodigieuse et d’une grande présomption. Ils s’en prirent aux dieux [...]. Après s’être torturé l’esprit, Zeus déclara : « Je crois tenir le moyen pour qu’il y ait encore des hommes et pour mettre en même temps fin à leur impudence : c’est qu’ils deviennent plus faibles. Je vais donc les séparer en deux [...]. » Sur ces mots il coupa les hommes en deux [...]. Ainsi leur corps était divisé en deux ; chacun alors, regrettant sa moitié, la rejoignait ; et ils se jetaient dans les bras les uns des autres et s’entrelaçaient dans le désir de s’unir, de ne plus faire qu’un ; ils mouraient de faim et généralement d’inanition, parce qu’il ne pouvaient rien faire les uns sans les autres [...]. Pris de pitié Zeus inventa un nouvel expédient : il déplaça sur le devant les organes génitaux ; car jusque-là ils les portaient derrière [...] il leur permit de s’engendrer les uns dans les autres [...]. C’est donc depuis cette lointaine époque que l’amour des uns pour les autres est inné chez les hommes, qu’il ramène l’unité de notre nature primitive, et entreprend de faire un seul être de deux et de guérir la nature humaine. Ainsi chacun de nous est le complément d’un être humain, pour avoir été coupé, comme les carrelets, et d’un, être devenu deux. Chacun ne cesse alors de chercher son complément [...] chaque fois que le hasard lui fait rencontrer cette moitié de lui-même, alors l’amoureux [...] est saisi — ô prodige ! — d’un sentiment d’amitié, de familiarité, d’amour ; ils ne veulent pour ainsi dire plus se séparer, fût-ce un instant [...]. Par l’union et la fusion avec son bien-aimé, de deux [l’amoureux désire] ne devenir qu’un. »
 
« Autrefois la nature humaine n’était pas ce qu’elle est maintenant ; elle était bien différente. D’abord il y avait trois genres, et non deux comme maintenant, un mâle et une femelle ; s’y ajoutait un troisième genre qui participait des deux autres — dont l’appellation a subsisté — mais qui a lui-même disparu : il y avait un genre androgyne, dont l’aspect et le nom participait à la fois des deux autres [...]. Par ailleurs la forme de chaque homme était entièrement ronde, avec un dos arrondi et des côtes circulaires, avec quatre mains, autant de jambes et deux visages sur un cou d’une rondeur parfaitement régulière, mais une seule tête sous les deux visages regardant en sens opposés ; avec quatre oreilles, et deux sexes [...]. Ils étaient doués d’une force et d’une vigueur prodigieuse et d’une grande présomption. Ils s’en prirent aux dieux [...]. Après s’être torturé l’esprit, Zeus déclara : « Je crois tenir le moyen pour qu’il y ait encore des hommes et pour mettre en même temps fin à leur impudence : c’est qu’ils deviennent plus faibles. Je vais donc les séparer en deux [...]. » Sur ces mots il coupa les hommes en deux [...]. Ainsi leur corps était divisé en deux ; chacun alors, regrettant sa moitié, la rejoignait ; et ils se jetaient dans les bras les uns des autres et s’entrelaçaient dans le désir de s’unir, de ne plus faire qu’un ; ils mouraient de faim et généralement d’inanition, parce qu’il ne pouvaient rien faire les uns sans les autres [...]. Pris de pitié Zeus inventa un nouvel expédient : il déplaça sur le devant les organes génitaux ; car jusque-là ils les portaient derrière [...] il leur permit de s’engendrer les uns dans les autres [...]. C’est donc depuis cette lointaine époque que l’amour des uns pour les autres est inné chez les hommes, qu’il ramène l’unité de notre nature primitive, et entreprend de faire un seul être de deux et de guérir la nature humaine. Ainsi chacun de nous est le complément d’un être humain, pour avoir été coupé, comme les carrelets, et d’un, être devenu deux. Chacun ne cesse alors de chercher son complément [...] chaque fois que le hasard lui fait rencontrer cette moitié de lui-même, alors l’amoureux [...] est saisi — ô prodige ! — d’un sentiment d’amitié, de familiarité, d’amour ; ils ne veulent pour ainsi dire plus se séparer, fût-ce un instant [...]. Par l’union et la fusion avec son bien-aimé, de deux [l’amoureux désire] ne devenir qu’un. »
*[http://fr.wikipedia.org/wiki/Platon Platon], « Mythe d’Aristophane », ''Le Banquet'', 189d-192e, traduction de Bernard et Renée, Nathan, 1983, pp. 58-61
 
  
== Textus ==
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— Platon, « Mythe d’Aristophane », ''Le Banquet'', 189d-192e, traduction de Bernard et Renée, Nathan, 1983, pp. 58-61
  
*[[Ménexène — Platon]]
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== Textes ==
  
== Bibliographia ==
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*[[Ménexène - Platon]]
  
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Citations

« Autrefois la nature humaine n’était pas ce qu’elle est maintenant ; elle était bien différente. D’abord il y avait trois genres, et non deux comme maintenant, un mâle et une femelle ; s’y ajoutait un troisième genre qui participait des deux autres — dont l’appellation a subsisté — mais qui a lui-même disparu : il y avait un genre androgyne, dont l’aspect et le nom participait à la fois des deux autres [...]. Par ailleurs la forme de chaque homme était entièrement ronde, avec un dos arrondi et des côtes circulaires, avec quatre mains, autant de jambes et deux visages sur un cou d’une rondeur parfaitement régulière, mais une seule tête sous les deux visages regardant en sens opposés ; avec quatre oreilles, et deux sexes [...]. Ils étaient doués d’une force et d’une vigueur prodigieuse et d’une grande présomption. Ils s’en prirent aux dieux [...]. Après s’être torturé l’esprit, Zeus déclara : « Je crois tenir le moyen pour qu’il y ait encore des hommes et pour mettre en même temps fin à leur impudence : c’est qu’ils deviennent plus faibles. Je vais donc les séparer en deux [...]. » Sur ces mots il coupa les hommes en deux [...]. Ainsi leur corps était divisé en deux ; chacun alors, regrettant sa moitié, la rejoignait ; et ils se jetaient dans les bras les uns des autres et s’entrelaçaient dans le désir de s’unir, de ne plus faire qu’un ; ils mouraient de faim et généralement d’inanition, parce qu’il ne pouvaient rien faire les uns sans les autres [...]. Pris de pitié Zeus inventa un nouvel expédient : il déplaça sur le devant les organes génitaux ; car jusque-là ils les portaient derrière [...] il leur permit de s’engendrer les uns dans les autres [...]. C’est donc depuis cette lointaine époque que l’amour des uns pour les autres est inné chez les hommes, qu’il ramène l’unité de notre nature primitive, et entreprend de faire un seul être de deux et de guérir la nature humaine. Ainsi chacun de nous est le complément d’un être humain, pour avoir été coupé, comme les carrelets, et d’un, être devenu deux. Chacun ne cesse alors de chercher son complément [...] chaque fois que le hasard lui fait rencontrer cette moitié de lui-même, alors l’amoureux [...] est saisi — ô prodige ! — d’un sentiment d’amitié, de familiarité, d’amour ; ils ne veulent pour ainsi dire plus se séparer, fût-ce un instant [...]. Par l’union et la fusion avec son bien-aimé, de deux [l’amoureux désire] ne devenir qu’un. »

— Platon, « Mythe d’Aristophane », Le Banquet, 189d-192e, traduction de Bernard et Renée, Nathan, 1983, pp. 58-61

Textes

Bibliographie

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