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Citationes

« Ce n'est pas la religion, c'est la révolution qui est l'opium du peuple. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 204

« Après l'écroulement de notre civilisation, de deux choses l'une : ou elle périra tout entière comme les civilisations antiques, ou elle s'adaptera à un monde décentralisé.

Il dépend de nous, non pas de briser la centralisation (car elle fait automatiquement boule de neige jusqu'à la catastrophe) mais de préparer l'avenir.

Notre époque a détruit la hiérarchie intérieure. Comment laisserait-elle subsister la hiérarchie sociale qui n'en est qu'une image grossière ?

Tu ne pourrais pas être née à une meilleure époque que celle-ci où on a tout perdu. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), pp. 199-200

« D'où nous viendra la renaissance, à nous qui avons souillé et vidé tout le globe terrestre ?

Du passé seul, si nous l'aimons. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 198

« La seule chose qui puisse faire de la légitimité pure, idée absolument dépourvue de force, quelque chose de souverain, c’est la pensée : cela a toujours été, cela sera toujours.

C’est pourquoi une réforme doit toujours apparaître, soit comme retour à un passé qu’on avait laissé dégrader, soit comme adaptation d’une institution à des conditions nouvelles, adaptation ayant pour objet non pas un changement, mais au contraire le maintien d’un rapport invariant, comme si l’on a le rapport 12 sur 4 et que 4 devienne 5, le vrai conservateur n'est pas celui qui veut 12 sur 5, mais celui qui de 12 fait 15. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 195

« Les Juifs, cette poignée de déracinés a causé le déracinement de tout le globe terrestre. Leur part dans le christianisme a fait de la chrétienté une chose déracinée par rapport à son propre passé. La tentative de réenracinement de la Renaissance a échoué parce qu'elle était d'orientation antichrétienne. La tendance des "lumières", 1789, la laïcité, etc., ont accru encore infiniment le déracinement par le mensonge du progrès. Et l'Europe déracinée a déraciné le reste du monde par la conquête coloniale. Le capitalisme, le totalitarisme font partie de cette progression dans le déracinement ; les antisémites, naturellement, propagent l'influence juive. Mais avant qu'ils déracinent par le poison, l'Assyrie en Orient, Rome en Occident avaient déraciné par le glaive. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 190

« Le christianisme primitif a fabriqué le poison de la notion de progrès par l'idée de la pédagogie divine formant les hommes pour les rendre capables de recevoir le message du Christ. Cela s'accordait avec l'espoir de la conversion universelle des nations et de la fin du monde comme phénomènes imminents. Mais aucun des deux ne s'étant produit, au bout de dix-sept siècles on a prolongé cette notion de progrès au delà du moment de la Révélation chrétienne. Dès lors elle devait se retourner contre le christianisme. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 191

« La force d'âme des communistes vient de ce qu'ils se portent, non seulement vers ce qu'ils croient être le bien, mais vers ce qu'ils croient qui va inéluctablement et prochainement se produire. Ainsi, ils peuvent, sans être des saints — il s'en faut de beaucoup — supporter des dangers et des souffrances que seul un saint supporterait pour la justice toute seule.

À certains égards, l'état d'esprit des communistes est très analogue à celui des premiers chrétiens. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 185

« L'art n'a pas d'avenir immédiat parce que tout art est collectif et qu'il n'y a plus de vie collective (il n'y a que des collectivités mortes), et aussi à cause de cette rupture du pacte véritable entre le corps et l'âme. L'art grec a coïncidé avec les débuts de la géométrie et avec l'athlétisme, l'art du Moyen Âge avec L’artisanat, l'art de la Renaissance avec les débuts de la mécanique, etc. Depuis 1914, il y a une coupure complète. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 172

« Ce monde est la porte fermée. C'est une barrière. Et, en même temps, c'est le passage.

Deux prisonniers, dans des cachots voisins, qui communiquent par des coups frappés contre le mur. Le mur est ce qui les sépare, mais aussi ce qui leur permet de communiquer. Ainsi nous et Dieu. Toute séparation est un lien. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 164

« Prométhée, le dieu crucifié pour avoir trop aimé les hommes. Hippolyte, l'homme puni pour avoir été trop pur et trop aimé des dieux. C'est le rapprochement de l'humain et du divin qui appelle le châtiment. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 105

« Se vider de sa fausse divinité, se nier soi-même, renoncer à être en imagination le centre du monde, discerner tous les points du monde comme étant des centres au même titre et le véritable centre comme étant hors du monde, c’est consentir au règne de la nécessité mécanique dans la matière et du libre choix au centre de chaque âme. Ce consentement est amour. La face de cet amour tournée vers les personnes pensantes est charité du prochain ; la face tournée vers la matière est amour de l’ordre du monde, ou, ce qui est la même chose, amour de la beauté du monde. »

  • Simone Weil, Attente de Dieu (1942), éd. Seuil, colI. Livre de vie, 1977, pp. 148-149

« Ce qui permet de contempler la nécessité et de l’aimer, c’est la beauté du monde. Sans la beauté ce ne serait pas possible. »

« Dans la beauté du monde la nécessité brute devient objet d’amour. Rien n’est beau comme la pesanteur dans les plis fugitifs des ondulations de la mer ou les plis presque éternels des montagnes. La mer n’est pas moins belle à nos yeux parce que parfois des bateaux sombrent. Elle en est plus belle au contraire. Si elle modifiait le mouvement de ses vagues pour épargner un bateau, elle serait un être doué de discernement et de choix, non pas ce fluide parfaitement obéissant à toutes les pressions extérieures. C’est cette parfaite obéissance qui est sa beauté. »

  • Simone Weil, Attente de Dieu (1942), éd. Seuil, colI. Livre de vie, 1977, p. 112

« L’art est une tentative pour transporter dans une quantité finie de matière modelée par l’homme une image de la beauté infinie de l’univers entier. Si la tentative est réussie, cette portion de matière ne doit pas cacher l’univers, mais au contraire en révéler la réalité tout autour. »

  • Simone Weil, Attente de Dieu (1942), éd. Seuil, colI. Livre de vie, 1977, p. 159

« Quand on écoute du Bach ou une mélodie grégorienne, toutes les facultés de l'âme se tendent et se taisent, pour appréhender cette chose parfaitement belle, chacune à sa façon. L'intelligence entre autres : elle n'y trouve rien à affirmer et à nier, mais elle s'en nourrit.

La foi ne doit-elle pas être adhésion de cette espèce ?

On dégrade les mystères de la foi en en faisant un objet d'affirmation ou de négation, alors qu'ils doivent être un objet de contemplation. »

  • Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. Agora, 1988 (ISBN 9782266045964), p. 208

« Comme il y a des milieux de culture pour certains animaux microscopiques, des terrains indispensables pour certaines plantes, de même il y a une certaine partie de l'âme en chacun et certaines manières de penser et d'agir circulant des uns aux autres qui ne peuvent exister que dans le milieu national et disparaissent quand le pays est détruit. »

« Qui est déraciné déracine, qui est enraciné ne déracine pas. »

« Le problème d'une méthode pour insuffler une inspiration à un peuple est tout neuf. [...] Il est fâcheux pour nous que ce problème, sur lequel, sauf erreur, il n'y a rien qui puisse nous guider, soit précisément le problème que nous avons aujourd'hui à résoudre de toute urgence, sous peine non pas tant de disparaître que de n'avoir jamais existé. »

« La chair n’est pas ce qui nous éloigne de Dieu, elle est le voile que nous mettons devant nous, pour faire écran entre Dieu et nous. » [La chair, n’est pas, en elle-même, "antispirituelle", mais "le voile" peut devenir un obturateur ou même un mur.]

« L'obéissance à un homme dont l'autorité n'est pas illuminée de légitimité, c'est un cauchemar. »

« - Je n'aime pas beaucoup entendre des gens parfaitement confortables ici, traiter de lâches et de traîtres ceux qui, en France, se débrouillent comme ils peuvent dans une situation terrible [...] Je crois que Pétain a fait à peu près tout ce que la situation générale et son propre état physique et mental lui permettaient de faire pour limiter les dégats. »

  • Simone Weil, New York, 1942, lettre au professeur Jean Walh, Cahiers Simone Weil, mars 1987

« Le mot de révolution est un mot pour lequel on tue, pour lequel on meurt, pour lequel on envoie les masses populaires à la mort, mais qui n'a aucun contenu. »

  • Simone Weil, Réflexions sur les causes de la liberté et de l'oppression sociale (1934), éd. Gallimard, coll. Folio essais, 1955, p. 39

« Le marxisme est tout à fait une religion, au sens le plus impur de ce mot. Il a notamment en commun avec toutes les formes intérieures de vie religieuse le fait d’avoir été continuellement utilisé, selon la parole si juste de Marx, comme l’opium du peuple. »

« Quand je pense que les grands chefs bolcheviks prétendaient créer une classe ouvrière libre et qu’aucun d’eux, Trotski sûrement pas, Lénine je ne crois pas non plus, n’avait sans doute mis le pied dans une usine et par suite n’avait la plus faible idée des conditions réelles qui déterminent la servitude ou la liberté des ouvriers, la politique m’apparaît comme une sinistre rigolade. »

« Un homme qui serait seul dans l’univers n’aurait aucun droit, mais seulement des obligations. »

  • Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, 1949

« Le malheur rend Dieu absent pendant un temps, plus absent qu'un mort, plus absent que la lumière dans un cachot complètement ténébreux. Une sorte d'horreur submerge toute l'âme. Pendant cette absence il n'y a rien à aimer. Ce qui est terrible, c'est que si, dans ces ténèbres où il n'y a rien à aimer, l'âme cesse d'aimer, l'absence de Dieu devient définitive. Il faut que l'âme continue à aimer à vide, ou du moins à vouloir aimer, fût-ce avec une partie infinitésimale d'elle-même. Alors un jour Dieu vient se montrer lui-même à elle et lui révéler la beauté du monde, comme ce fut le cas pour Job. Mais si l'âme cesse d'aimer, elle tombe dès ici-bas dans quelque chose de presque équivalent à l'enfer. »

  • Simone Weil, Attente de Dieu (1942), éd. Seuil, colI. Livre de vie, 1977, p. 81

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