Différences entre les versions de « Jean-Claude Michéa »

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« [...] le rôle insolite que joue dans la bonne conscience des classes privilégiées contemporaines, la compassion philanthropique pour l’“exclu”, qu’il soit SDF, “sans-papiers”, “jeune des cités” ou autre. C’est que l’exclu, si on lui confère le monopole de la souffrance légitime, présente un double avantage : d’abord parce qu’il appartient à une catégorie, par définition, minoritaire (ce qui restreint immédiatement le champ de l’injustice et, partant, celui de la mauvaise conscience) ensuite, et surtout, parce qu’il permet de renvoyer d’un seul coup, ''par sa seule existence'', l’ensemble des travailleurs ordinaires, ''inclus'' dans le système d’exploitation classique, du côté des nantis et des privilégiés. »
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« '''Les sociétés modernes sont les premières, dans l’Histoire, à expérimenter l’étrange idée que le destin de tout individu n’est pas de devenir adulte mais de ''rester jeune''''', et cela éternellement. Sous le règne croissant de l’économie déchaînée, la vie des hommes tend donc à devenir une course parfaitement absurde pour ne jamais vieillir et ne jamais mourir, c’est-à-dire, en somme, pour se nier en tant qu’humanité. [...] toute société progressiste — vivant par définition ''à l’ombre de l’avenir'' — est philosophiquement tenue de mythifier la jeunesse (qui représente officiellement cet avenir) [...]. Et le seule remède de l’utopie libérale sera conduite à proposer, pour guérir la maladie qu’elle crée, ne pourra être recherché que dans la possibilité de refabriquer intégralement l’homme au moyen des nouvelle biotechnologies : autrement dit dans la création de ce que Fukuyama nomme, avec émerveillement, une “posthumanité”, indéfiniment reprogrammable selon les progrès du système capitaliste. »
 
« '''Les sociétés modernes sont les premières, dans l’Histoire, à expérimenter l’étrange idée que le destin de tout individu n’est pas de devenir adulte mais de ''rester jeune''''', et cela éternellement. Sous le règne croissant de l’économie déchaînée, la vie des hommes tend donc à devenir une course parfaitement absurde pour ne jamais vieillir et ne jamais mourir, c’est-à-dire, en somme, pour se nier en tant qu’humanité. [...] toute société progressiste — vivant par définition ''à l’ombre de l’avenir'' — est philosophiquement tenue de mythifier la jeunesse (qui représente officiellement cet avenir) [...]. Et le seule remède de l’utopie libérale sera conduite à proposer, pour guérir la maladie qu’elle crée, ne pourra être recherché que dans la possibilité de refabriquer intégralement l’homme au moyen des nouvelle biotechnologies : autrement dit dans la création de ce que Fukuyama nomme, avec émerveillement, une “posthumanité”, indéfiniment reprogrammable selon les progrès du système capitaliste. »

Version du 28 juin 2021 à 16:53

Jean-Claude Michéa.jpg

Citationes

« [...] le rôle insolite que joue dans la bonne conscience des classes privilégiées contemporaines, la compassion philanthropique pour l’“exclu”, qu’il soit SDF, “sans-papiers”, “jeune des cités” ou autre. C’est que l’exclu, si on lui confère le monopole de la souffrance légitime, présente un double avantage : d’abord parce qu’il appartient à une catégorie, par définition, minoritaire (ce qui restreint immédiatement le champ de l’injustice et, partant, celui de la mauvaise conscience) ensuite, et surtout, parce qu’il permet de renvoyer d’un seul coup, par sa seule existence, l’ensemble des travailleurs ordinaires, inclus dans le système d’exploitation classique, du côté des nantis et des privilégiés. »

— Jean-Claude Michéa, Impasse Adam Smith (2002), éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2010 (ISBN 9782081240797), p. 68-69


« Les sociétés modernes sont les premières, dans l’Histoire, à expérimenter l’étrange idée que le destin de tout individu n’est pas de devenir adulte mais de rester jeune, et cela éternellement. Sous le règne croissant de l’économie déchaînée, la vie des hommes tend donc à devenir une course parfaitement absurde pour ne jamais vieillir et ne jamais mourir, c’est-à-dire, en somme, pour se nier en tant qu’humanité. [...] toute société progressiste — vivant par définition à l’ombre de l’avenir — est philosophiquement tenue de mythifier la jeunesse (qui représente officiellement cet avenir) [...]. Et le seule remède de l’utopie libérale sera conduite à proposer, pour guérir la maladie qu’elle crée, ne pourra être recherché que dans la possibilité de refabriquer intégralement l’homme au moyen des nouvelle biotechnologies : autrement dit dans la création de ce que Fukuyama nomme, avec émerveillement, une “posthumanité”, indéfiniment reprogrammable selon les progrès du système capitaliste. »

— Jean-Claude Michéa, Impasse Adam Smith (2002), éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2010 (ISBN 9782081240797), p. 44-47


« À la base de la vie humaine, on constate, en effet, qu’une partie importante des biens ont toujours tendance à circuler, et des services à se rendre, selon ce que Mauss appelait le cycle du don, c’est-à-dire selon la triple obligation — à la fois contraignante et facultative, intéressé et désintéressée — de “donner, recevoir et rendre”. C’est avant tout cette logique du don, irréductible à tout calcul purement économique, qui explique — Serge Latouche l’a brillamment montré sur l’exemple africain — pourquoi et comment de vastes secteurs de l’humanité continuent de mener une vie réelle — quoiqu’invisible aux “experts” — sous l’écorce officielle des rapports capitalistes. Naturellement, il ne s’agit pas là d’une particularité propre aux société traditionnelles et qui ne survivrait chez nous, que sous des formes marginales ou folkloriques. »

— Jean-Claude Michéa, Impasse Adam Smith (2002), éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2010 (ISBN 9782081240797), p. 39


« [...] jamais, dans l’histoire de l’humanité, un système social et politique n’avait — en un temps aussi court — changé à ce point la face entière du monde [...]. »

— Jean-Claude Michéa, Les Mystères de la Gauche (2013), éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2014 (ISBN 9782081313026), p. 


« Une solution beaucoup plus simple est, évidemment, d’adopter la posture schizophrénique de la droite traditionnelle qui, selon le mot du critique américain Russel Jacoby, “vénèrent le marché tout en maudissant la culture qu’il engendre” (et dont le pendant idéologique exact est cette gauche contemporaine qui n’affirme combattre la logique du Marché — de moins en moins, il est vrai — que pour se prosterner avec enthousiasme devant la culture qu’il engendre). »

— Jean-Claude Michéa, L’Empire du moindre mal (2007), éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2010 (ISBN 9782081220430), p. 130


« Comme chacun peut le constater, là où les sociétés totalitaires s’en tenaient au principe simpliste, et coûteux en vies humaines, du parti unique, le capitalisme contemporain lui a substitué, avec infiniment plus d’élégance (et d’efficacité), celui de l’alternance unique. »

— Jean-Claude Michéa, L’Empire du moindre mal (2007), éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2010 (ISBN 9782081220430), p. 122


« [...] la capacité de sacrifier sa vie, quand les circonstances l’exigeaient, à sa communauté d’appartenance a toujours constitué la vertu proclamée des différentes sociétés traditionnelles, c’est-à-dire de celles qui confèrent une place privilégiée aux relations de face-à-face, et par conséquent, aux sentiments de honte et d’honneur. Du guerrier primitif au citoyen de la Rome antique [...], du martyr de la foi chrétienne au chevalier médiéval, c’était cette disposition permanente au sacrifice ultime qui, pour le meilleur et pour le pire, fondait officiellement l’estime de soi des individus et la garantie de leur possible gloire éternelle, que cette gloire soit profane ou sacrée.

[...] la modernité occidentale apparaît donc comme la première civilisation de l’Histoire qui ait entrepris de faire de la conservation de soi le premier (voire l’unique) souci de l’individu raisonnable, et l’idéal fondateur de la société qu’il doit former avec ses semblables. Comme le souligne clairement Benjamin Constant, « le but des modernes est la sécurité dans les jouissances privées ; et ils nomment liberté les garanties accordées par les institutions à ces jouissances ».

— Jean-Claude Michéa, L’Empire du moindre mal (2007), éd. Flammarion, coll. « Champs Essais », 2010 (ISBN 9782081220430), p. 28-30


Bibliographia

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