« Lorsque les pères s’habituent à laisser faire les enfants, lorsque les fils ne tiennent plus compte de leurs paroles, lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les flatter, lorsque finalement les jeunes méprisent les lois parce qu’ils ne reconnaissent plus au-dessus d’eux l’autorité de rien et de personne, alors, c’est là, en toute beauté et en toute jeunesse, le début de la tyrannie. »

« C'est la vérité même que si Dieu n'a pas présidé à l’établissement d’une cité, et qu’elle n’ait eu qu’un commencement humain, elle ne peut échapper aux plus grands maux. Il faut donc tâcher, par tous les moyens imaginables, d’imiter le régime primitif ; et nous confiant en ce qu'il y a d'immortel dans l’homme, nous devons fonder les maisons, ainsi que les États, en consacrant comme les lois les volontés de l’intelligence (suprême). Que si un État (quelle que soit sa forme) est fondé sur le vice, et gouverné par des gens qui foulent aux pieds la justice, il ne lui reste aucun moyen de salut. »

  • Platon, de Leg., tom. VIII, cité par Joseph de Maistre dans Essai sur le principe générateur des constitutions politiques et des autres institutions humaines

« Mais le précepte le plus essentiel est que nul, ni homme ni femme, ne reste sans chef ; que nulle tête d'homme ne s'habitue, soit en combat réel, soir dans les jeux, à agir seule et sans contrôle ; il faut, au contraire, en guerre comme en paix, vivre les yeux constamment fixés sur le chef et soumis à ses ordres et se laisser diriger par lui jusque dans ses plus simples gestes ; s'arrêter au commandement, marcher, s'exercer, prendre son bain ou son repas [...] En un mot, se dresser soi-même et s'habituer à ne connaître ni apprendre l'action isolée. »

« Selon toute vraisemblance, aucun autre régime ne peut donner naissance à la tyrannie que la démocratie ; de la liberté extrême naît la servitude la plus complète et la plus terrible. »

« La nécessité qui est mère de l'invention... »

  • Platon, La République, Livre II

« Nul n’est méchant volontairement. »

« Vous autres Grecs, vous êtes toujours des enfants : il n'y a pas de vieillards en Grèce, déclara le vieux prêtre. -Que veux tu dire ? demanda Solon. -Vous êtes jeunes d'esprit, car vous ne possédez nulle tradition vraiment antique, nulle notion blanchie par le temps... »

« Autrefois la nature humaine n’était pas ce qu’elle est maintenant ; elle était bien différente. D’abord il y avait trois genres, et non deux comme maintenant, un mâle et une femelle ; s’y ajoutait un troisième genre qui participait des deux autres — dont l’appellation a subsisté — mais qui a lui-même disparu : il y avait un genre androgyne, dont l’aspect et le nom participait à la fois des deux autres [...]. Par ailleurs la forme de chaque homme était entièrement ronde, avec un dos arrondi et des côtes circulaires, avec quatre mains, autant de jambes et deux visages sur un cou d’une rondeur parfaitement régulière, mais une seule tête sous les deux visages regardant en sens opposés ; avec quatre oreilles, et deux sexes [...]. Ils étaient doués d’une force et d’une vigueur prodigieuse et d’une grande présomption. Ils s’en prirent aux dieux [...]. Après s’être torturé l’esprit, Zeus déclara : « Je crois tenir le moyen pour qu’il y ait encore des hommes et pour mettre en même temps fin à leur impudence : c’est qu’ils deviennent plus faibles. Je vais donc les séparer en deux [...]. » Sur ces mots il coupa les hommes en deux [...]. Ainsi leur corps était divisé en deux ; chacun alors, regrettant sa moitié, la rejoignait ; et ils se jetaient dans les bras les uns des autres et s’entrelaçaient dans le désir de s’unir, de ne plus faire qu’un ; ils mouraient de faim et généralement d’inanition, parce qu’il ne pouvaient rien faire les uns sans les autres [...]. Pris de pitié Zeus inventa un nouvel expédient : il déplaça sur le devant les organes génitaux ; car jusque-là ils les portaient derrière [...] il leur permit de s’engendrer les uns dans les autres [...]. C’est donc depuis cette lointaine époque que l’amour des uns pour les autres est inné chez les hommes, qu’il ramène l’unité de notre nature primitive, et entreprend de faire un seul être de deux et de guérir la nature humaine. Ainsi chacun de nous est le complément d’un être humain, pour avoir été coupé, comme les carrelets, et d’un, être devenu deux. Chacun ne cesse alors de chercher son complément [...] chaque fois que le hasard lui fait rencontrer cette moitié de lui-même, alors l’amoureux [...] est saisi — ô prodige ! — d’un sentiment d’amitié, de familiarité, d’amour ; ils ne veulent pour ainsi dire plus se séparer, fût-ce un instant [...]. Par l’union et la fusion avec son bien-aimé, de deux [l’amoureux désire] ne devenir qu’un. »

— Platon, « Mythe d’Aristophane », Le Banquet, 189d-192e, traduction de Bernard et Renée, Nathan, 1983, pp. 58-61