Benjamin Constant
Citationes
« [...] prions l’autorité de rester dans ses limites. Qu'elle se borne à être juste ; nous nous chargerons d’être heureux. »
- Benjamin Constant, De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes (1819), in Œuvres politiques, éd. Charles Louandre, 1874, p. 283
« Augmenter la force de l'autorité collective n'est jamais que donner plus de pouvoir à quelques individus. Si la méchanceté des hommes est un argument contre la liberté, elle en est un plus fort encore contre la puissance. Car le despotisme n'est autre chose que la liberté d'un seul ou de quelques-uns contre tous. »
- Benjamin Constant, Les "Principes de politique" de Benjamin Constant, éd. Droz, 1980 (ISBN 9782600039772), vol. 1, p. 384
« Dans tous les temps la guerre sera, pour les gouvernements, un moyen d'accroître leur autorité. Elle sera pour les despotes une distraction qu'ils jetteront à leurs esclaves , afin que ceux-ci s'aperçoivent moins de leur esclavage. Elle sera, pour les favoris des despotes, une diversion à laquelle ils auront recours pour empêcher leurs maîtres de pénétrer dans les détails de leur administration vexatoire. Elle sera, pour les démagogues, un mode d'enflammer les passions de la multitude, et de la précipiter dans des extrémités qui favoriseront leurs conseils violents ou leurs vues intéressées. »
- Benjamin Constant, Commentaire sur l'ouvrage de Filangier (1822-1824), Œuvres de G. Filangieri, vol. 6, éd. P. Dufart, 1822, p. 11
« Il faut que la puissance du gouvernement contrarie le moins qu'il est possible la marche de l'espèce humaine. »
- Benjamin Constant, Cours de politique constitutionelle (1818-1820), éd. Societe belge de librairie, 1837, p. 164
« L'impôt [...] est infailliblement nuisible. »
- Benjamin Constant, Commentaire sur L'Ouvrage de Filangieri (1822), in Œuvres de G. Filangieri, éd. P. Dufart, 1822, vol. 6, p. 157
« Tout impôt inutile est une atteinte contre la propriété, d'autant plus odieuse qu'elle s'exécute avec toute la solennité de la loi, d'autant plus révoltante que c'est le riche qui l'exerce contre le pauvre, l'autorité en armes contre l'individu désarmé. »
« Ainsi, le peuple n’est pas misérable seulement parce qu’il paie au-delà de ses moyens, mais il est misérable encore par l’usage que l’on fait de ce qu’il paie. »
« L’excès des impôts conduit à la subversion de la justice, à la détérioration de la morale, à la destruction de la liberté individuelle. »
- Benjamin Constant, Principes de Politique, 1815
« Le commerce inspire aux hommes un vif amour pour l’indépendance individuelle. Le commerce subvient à leurs besoins, satisfait à leurs désirs, sans l’intervention de l’autorité. Cette intervention est presque toujours, et je ne sais pourquoi je dis presque, cette intervention est toujours un dérangement et une gêne. Toutes les fois que le pouvoir collectif veut se mêler des spéculations particulières, il vexe les spéculateurs. Toutes les fois que les gouvernements prétendent faire nos affaires, ils les font plus mal et plus dispendieusement que nous. »
- Benjamin Constant, De la liberté des Modernes comparée à celle des Anciens, 1819
« La guerre et le commerce ne sont que deux moyens différents d'arriver au même but : celui de posséder ce que l'on désire. »
- Benjamin Constant, « De l'esprit de conquête et de l'usurpation dans leurs rapports avec la civilisation européenne », dans Adolphe, suivi de : Quelques réflexions sur le théâtre allemand et la tragédie de Wallstein ; De l'esprit de conquête et de l'usurpation, éd. Charpentier, 1845, partie I (« De l'esprit de conquête »), chap. 2, p. 201
« Il y a une partie de l'existence qui, de nécessité, reste individuelle et indépendante, et qui est de droit hors de toute compétence sociale. La souveraineté n'existe que d'une manière limitée et relative. »
« Le peuple, dit Rousseau, est souverain sous un rapport et sujet sous un autre : mais dans la pratique, ces deux rapports se confondent. Il est facile à l'autorité d'opprimer le peuple comme sujet, pour le forcer à manifester comme souverain la volonté qu'elle lui prescrit. »
« L'erreur de ceux qui, de bonne foi dans leur amour de la liberté, ont accordé à la souveraineté du peuple un pouvoir sans bornes, vient de la manière dont se sont formées leurs idées en politique. Ils ont vu dans l'histoire un petit nombre d'hommes, ou même un seul, en possession d'un pouvoir immense, qui faisait beaucoup de mal ; mais leur courroux s'est dirigé contre les possesseurs du pouvoir, et non contre le pouvoir même. Au lieu de le détruire, ils n'ont songé qu'à le déplacer. »
- Benjamin Constant, Principes de politique, 1815
« Combien il vaut mieux souffrir de l'oppression de ses ennemis que rougir des excès de ses alliés. »
- Benjamin Constant, « De l'esprit de conquête et de l'usurpation dans leurs rapports avec la civilisation européenne », dans Adolphe, suivi de : Quelques réflexions sur le théâtre allemand et la tragédie de Wallstein ; De l'esprit de conquête et de l'usurpation, éd. Charpentier, 1845, partie II (« De l'usurpation »), chap. 19, p. 369
« Soyez justes, dirais-je aux hommes investis de la puissance. Soyez justes quoi qu'il arrive, car si vous ne pouviez gouverner avec la justice, avec l'injustice même, vous ne gouverneriez pas longtemps. »
« Sous une Constitution représentative, une nation n'est libre que quand les députés ont un frein. »
« Si c'est la législation qui fixe les droits de chaque individu, les individus n'ont plus que les droits que la législation veut bien leur laisser. »
« Une Constitution est par elle-même un acte de défiance, puisqu'elle prescrit des limites à l'autorité, et qu'il serait inutile de lui prescrire des limites si vous la supposiez douée d'une infaillible sagesse et d'une éternelle modération. »
- Benjamin Constant, discours prononcé au Tribunat, 5 janvier 1800
« L’obéissance à la loi est un devoir ; mais, comme tous les devoirs, il n’est pas absolu, il est relatif : il repose sur la supposition que la loi part d’une source légitime et se renferme dans ses justes bornes. Aucun devoir ne nous lierait envers des lois qui non seulement restreindraient nos libertés légitimes et s’opposeraient à des actions qu’elles n’auraient pas le droit d’interdire, mais qui nous en commanderaient de contraires aux principes éternels de justice et de pitié, que l’homme ne peut cesser d’observer sans démentir sa nature. »
- Benjamin Constant, Principes de politique
« Dans tout ce qu'on nomme les excès de la liberté, je ne reconnais que l'éducation de la servitude. »
« J’ai défendu quarante ans le même principe, liberté en tout, en religion, en philosophie, en littérature, en industrie, en politique : et par liberté, j’entends le triomphe de l’individualité, tant sur l’autorité qui voudrait gouverner par le despotisme, que sur les masses qui réclament le droit d’asservir la minorité à la majorité. »
« La liberté individuelle, voila la véritable liberté moderne. La liberté politique en est la garantie; la liberté politique est par conséquent indispensable. Mais demander aux peuples de nos jours de sacrifier, comme ceux d'autrefois, la totalité de leur liberté individuelle à leur liberté politique (édicter à la majorité des lois pour réglementer le comportement de chacun, ostracisme, censure), c'est le plus sûr moyen de les détacher de l'une; et quand on y serait parvenu, on ne tarderait pas à leur ravir l'autre. »
- Benjamin Constant, De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes, 1819
« L'individu n'est, même dans les états les plus libres, souverain qu'en apparence [...] sa souveraineté est restreinte, presque toujours suspendue […] et si, à des époques fixes et rares, et entouré de précautions et d'entraves, il exerce cette souveraineté, ce n'est jamais que pour l'abdiquer. »
- Benjamin Constant, Principes de politique (1815), éd. Guillaumin, 1872, p. 9
« L'erreur de ceux qui, de bonne foi dans leur amour de la liberté, ont accordé à la souveraineté du peuple un pouvoir sans bornes, vient de la manière dont se sont formées leurs idées en politique. Ils ont vu dans l'histoire un petit nombre d'hommes, ou même un seul, en possession d'un pouvoir immense, qui faisait beaucoup de mal; mais leur courroux s'est dirigé contre les possesseurs du pouvoir, et non contre le pouvoir même. Au lieu de le détruire, ils n'ont songé qu'à le déplacer. »
- Benjamin Constant, Principes de politique (1815), éd. Guillaumin, 1872, p. 9
« Quand un peuple n'est qu'esclave, sans être avili, il y a pour lui possibilité d'un meilleur état de choses. Si quelque circonstance heureuse le lui présente, il s'en montre digne. Le despotisme laisse cette chance à l'espèce humaine. Le joug de Philippe II et les échafauds du duc d'Albe ne dégradèrent point les généreux Hollandais. Mais l'usurpation avilit un peuple, en même temps qu'elle l'opprime : elle l'accoutume à fouler aux pieds ce qu'il respectait, à courtiser ce qu'il méprise, à se mépriser lui-même ; et pour peu qu'elle se prolonge, elle rend, même après sa chute, toute liberté, toute amélioration impossible. On renverse Commode; mais les Prétoriens mettent l'empire à l'enchère, et le peuple obéit à l'acheteur. »
« L'on peut trouver des motifs d'utilité pour tous les commandements et pour toutes les prohibitions. Défendre aux citoyens de sortir de leurs maisons serait utile ; car on empêcherait ainsi tous les délits qui se commettent sur les grandes routes. Obliger chacun de se présenter tous les matins devant les magistrats serait utile ; car on découvrirait plus facilement les vagabonds et les brigands qui se cachent pour les occasions de faire le mal. C'est avec cette logique qu'on avait transformé il y a vingt ans la France en un vaste cachot. »
« L'affreuse loi qui, sous Robespierre, déclara les preuves superflues et supprima les défenseurs, est un hommage rendu aux formes. Cette loi démontre que les formes, modifiées, mutiliées, torturées en tous sens par le génie des factions, gênaient encore des hommes choisis soigneusement entre tout le peuple, comme les plus affranchis de tout scrupule de conscience et de tout respect de l'opinion. »
« Vous avez beau diviser le pouvoir : si la somme totale du pouvoir est illimitée, les pouvoirs divisés n'ont qu'à former une coalition, et le despotisme est sans remède. Ce qui nous importe, ce n'est pas que nos droits ne puissent être violés par tel pouvoir sans l'approbation de tel autre, mais que cette violation soit interdite à tous les pouvoirs. »
« [Le pouvoir] est disposé à nous épargner toute espèce de peine, exceptée celle d'obéir et de payer ! »
- Benjamin Constant, Principes de politique (1815), éd. Guillaumin, 1872, p. 9