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Citations

« L’ordre du monde, c’est la beauté du monde. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 346


« La Providence divine n’est pas un trouble, une anomalie dans l’ordre du monde. C’est l’ordre du monde lui-même. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 336


« L’investigation scientifique n’est qu’une forme de la contemplation religieuse. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 315


« Du fait même de la désertion des églises par le peuple, la religion fut automatiquement située à droite, devint une chose bourgeoise, une chose de bien-pensants. Car en fait une religion instituée est bien obligée de s’appuyer sur ceux qui vont à l’église. Elle ne peut s’appuyer sur ceux qui restent dehors. [...] C’est presque uniquement la science qui a vidé les églises.

Si une partie de la bourgeoisie a été moins gênée dans sa piété par la science que ne l’a été la classe ouvrière, c’est d’abord parce qu’elle avait un contact moins permanent et moins charnel avec les applications de la science. Mais c’est surtout parce qu’elle n’avait pas la foi. Qui n’a pas la foi ne peut pas la perdre. Sauf quelques exceptions, la pratique de la religion était pour elle une convenance. La conception scientifique du monde n’empêche pas d’observer les convenances. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 301


« La science, avec la technique qui n’en est que l’application, est notre seul titre à être fiers d’être des Occidentaux, des gens de race blanche, des modernes. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 292


« L’unique source de salut et de grandeur pour la France, c’est de reprendre contact avec son génie au fond de son malheur. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 270


« Une partie des Français peut se dire hostile au christianisme ; mais avant comme après 1789, tous les mouvements de pensée qui ont eu lieu en France se sont réclamés de la raison. La France ne peut pas écarter la raison au nom de la patrie.

C’est pourquoi la France se sent mal à l’aise dans son patriotisme, et cela bien qu’elle-même, au XVIIe siècle, ait inventé le patriotisme moderne. Il ne faut pas croire que ce qu’on a nommé la vocation universelle de la France rende la conciliation entre le patriotisme et les valeurs universelles plus facile aux Français qu’à d’autres. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 209


« Si l’on admire l’Empire romain, pourquoi en vouloir à l’Allemagne qui essaie de le reconstituer, sur un territoire plus vaste, avec des méthodes presque identiques ? »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 208


« L’héritage des Barbares s’est mélangé à l’esprit chrétien pour former ce produit unique, inimitable, parfaitement homogène, qu’on a nommé la chevalerie. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 205


« [...] depuis longtemps l’enseignement n’est plus, aux yeux des parents comme des enfants, qu’une machine à procurer des diplômes, c’est-à-dire des situations. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 186


« L’État est une chose froide qui ne peut pas être aimée ; mais il tue et abolit tout ce qui pourrait l’être ; ainsi on est forcé de l’aimer, parce qu’il n’y a que lui. Tel est le supplice moral de nos contemporains. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 179


« Les Français n’avaient pas autre chose que la France à quoi être fidèles ; et quand ils l’abandonnèrent pour un moment, en juin 1940, on vit combien peut être hideux et pitoyable le spectacle d’un peuple qui n’est lié à rien par aucune fidélité. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 178


« [...] il est contre nature que la terre soit cultivée par des êtres déracinés. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 145


« Si notre culture était proche de la perfection, elle serait située au-dessus des classes sociales. Mais comme elle est médiocre, elle est dans une large mesure une culture d’intellectuels bourgeois, et plus particulièrement, depuis quelque temps, une culture d’intellectuels fonctionnaires. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 134


« Le passé détruit ne revient jamais plus. La destruction du passé est peut-être le plus grand de tous les crimes. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 121


« L’avenir ne nous apporte rien, ne nous donne rien ; c’est nous qui pour le construire devons tout lui donner, lui donner notre vie elle-même. Mais pour donner il faut posséder, et nous ne possédons d’autre vie, d’autre sève, que les trésors hérités du passé et digérés, assimilés, recréés par nous. De tous les besoins de l’âme humaine, il n’y en a pas de plus vital que le passé. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 120


« Qui est déraciné déracine. Qui est enraciné ne déracine pas. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 117


« Le déracinement est de loin la plus dangereuse maladie des sociétés humaines, car il se multiplie lui-même. Des êtres vraiment déracinés n’ont guère que deux comportements possibles : ou ils tombent dans une inertie de l’âme équivalente à la mort [...], ou ils se jettent dans une activité tendant toujours à déraciner, souvent par les méthodes les plus violentes, ceux qui ne le sont pas encore [...]. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 116-117


« La Renaissance a partout provoqué une coupure entre les gens cultivés et la masse ; mais en séparant la culture de la tradition nationale, elle la plongeait du moins dans la tradition grecque. Depuis, les liens avec les traditions nationales n’ont pas été renoués, mais la Grèce a été oubliée. Il en est résulté une culture qui s’est développée dans un milieu très restreint, séparé du monde, dans une atmosphère confinée, une culture considérablement orientée vers la technique et influencée par elle, très teintée de pragmatisme, extrêmement fragmentée par la spécialisation, tout à fait dénuée à la fois de contact avec cet univers-ci et d’ouverture vers l’autre monde. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 115


« Tout le monde sait que, lorsque le journalisme se confond avec l’organisation du mensonge, il constitue un crime. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 110


« Puis, de par sa durée, la collectivité pénètre déjà dans l’avenir. Elle contient de la nourriture, non seulement pour les âmes des vivants, mais aussi pour celles d’êtres non encore nés qui viendront au monde au cours des siècles prochains.

Enfin, de par la même durée, la collectivité a ses racines dans le passé. Elle constitue l’unique organe de conservation pour les trésors spirituels amassés par les morts, l’unique organe de transmission par l’intermédiaire duquel les morts puissent parler aux vivants. Et l’unique chose terrestre qui ait un lien direct avec la destinée éternelle de l’homme, c’est le rayonnement de ceux qui ont su prendre une conscience complète de cette destinée, transmis de génération en génération. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 82


« Un homme qui serait seul dans l’univers n’aurait aucun droit, mais il aurait des obligations. »

— Simone Weil, L’Enracinement (1943), éd. Gallimard, coll. « Champs Classiques », 2014 (ISBN 9782081295865), p. 77


« Quand on écoute du Bach ou une mélodie grégorienne, toutes les facultés de l’âme se tendent et se taisent, pour appréhender cette chose parfaitement belle, chacune à sa façon. L’intelligence entre autres : elle n’y trouve rien à affirmer et à nier, mais elle s’en nourrit.

La foi ne doit-elle pas être adhésion de cette espèce ?

On dégrade les mystères de la foi en en faisant un objet d’affirmation ou de négation, alors qu’ils doivent être un objet de contemplation. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 208


« Ce n’est pas la religion, c’est la révolution qui est l’opium du peuple. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 204


« Après l’écroulement de notre civilisation, de deux choses l’une : ou elle périra tout entière comme les civilisations antiques, ou elle s’adaptera à un monde décentralisé.

Il dépend de nous, non pas de briser la centralisation (car elle fait automatiquement boule de neige jusqu’à la catastrophe) mais de préparer l'avenir.

Notre époque a détruit la hiérarchie intérieure. Comment laisserait-elle subsister la hiérarchie sociale qui n’en est qu’une image grossière ?

Tu ne pourrais pas être née à une meilleure époque que celle-ci où on a tout perdu. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 199-200


« D’où nous viendra la renaissance, à nous qui avons souillé et vidé tout le globe terrestre ?

Du passé seul, si nous l’aimons. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 198


« La seule chose qui puisse faire de la légitimité pure, idée absolument dépourvue de force, quelque chose de souverain, c’est la pensée : cela a toujours été, cela sera toujours.

C’est pourquoi une réforme doit toujours apparaître, soit comme retour à un passé qu’on avait laissé dégrader, soit comme adaptation d’une institution à des conditions nouvelles, adaptation ayant pour objet non pas un changement, mais au contraire le maintien d’un rapport invariant, comme si l’on a le rapport 12 sur 4 et que 4 devienne 5, le vrai conservateur n’est pas celui qui veut 12 sur 5, mais celui qui de 12 fait 15. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 195


« L’obéissance à un homme dont l’autorité n’est pas illuminée de légitimité, c’est un cauchemar. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 195


« Les Juifs, cette poignée de déracinés a causé le déracinement de tout le globe terrestre. Leur part dans le christianisme a fait de la chrétienté une chose déracinée par rapport à son propre passé. La tentative de réenracinement de la Renaissance a échoué parce qu’elle était d’orientation antichrétienne. La tendance des "lumières", 1789, la laïcité, etc., ont accru encore infiniment le déracinement par le mensonge du progrès. Et l’Europe déracinée a déraciné le reste du monde par la conquête coloniale. Le capitalisme, le totalitarisme font partie de cette progression dans le déracinement ; les antisémites, naturellement, propagent l’influence juive. Mais avant qu’ils déracinent par le poison, l’Assyrie en Orient, Rome en Occident avaient déraciné par le glaive. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 190


« Le christianisme primitif a fabriqué le poison de la notion de progrès par l’idée de la pédagogie divine formant les hommes pour les rendre capables de recevoir le message du Christ. Cela s’accordait avec l’espoir de la conversion universelle des nations et de la fin du monde comme phénomènes imminents. Mais aucun des deux ne s’étant produit, au bout de dix-sept siècles on a prolongé cette notion de progrès au delà du moment de la Révélation chrétienne. Dès lors elle devait se retourner contre le christianisme. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 191


« La force d’âme des communistes vient de ce qu’ils se portent, non seulement vers ce qu’ils croient être le bien, mais vers ce qu’ils croient qui va inéluctablement et prochainement se produire. Ainsi, ils peuvent, sans être des saints — il s’en faut de beaucoup — supporter des dangers et des souffrances que seul un saint supporterait pour la justice toute seule.

À certains égards, l’état d’esprit des communistes est très analogue à celui des premiers chrétiens. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 185


« L’art n’a pas d’avenir immédiat parce que tout art est collectif et qu’il n’y a plus de vie collective (il n’y a que des collectivités mortes), et aussi à cause de cette rupture du pacte véritable entre le corps et l’âme. L’art grec a coïncidé avec les débuts de la géométrie et avec l’athlétisme, l’art du Moyen Âge avec l’artisanat, l’art de la Renaissance avec les débuts de la mécanique, etc. Depuis 1914, il y a une coupure complète. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 172


« Ce monde est la porte fermée. C’est une barrière. Et, en même temps, c’est le passage.

Deux prisonniers, dans des cachots voisins, qui communiquent par des coups frappés contre le mur. Le mur est ce qui les sépare, mais aussi ce qui leur permet de communiquer. Ainsi nous et Dieu. Toute séparation est un lien. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 164


« Croix comme balance, comme levier. Descente, condition de la montée. Le ciel descendant sur terre soulève la terre au ciel. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 109


« Prométhée, le dieu crucifié pour avoir trop aimé les hommes. Hippolyte, l’homme puni pour avoir été trop pur et trop aimé des dieux. C’est le rapprochement de l’humain et du divin qui appelle le châtiment. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 105


« “Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?”

Là est la véritable preuve que le christianisme est quelque chose de divin. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 103


« La chair n’est pas ce qui nous éloigne de Dieu, elle est le voile que nous mettons devant nous, pour faire écran entre Dieu et nous. »

— Simone Weil, La Pesanteur et la Grâce (1942), éd. Plon, coll. « Agora », 1988 (ISBN 9782266045964), p. 71


« Le malheur rend Dieu absent pendant un temps, plus absent qu’un mort, plus absent que la lumière dans un cachot complètement ténébreux. Une sorte d’horreur submerge toute l’âme. Pendant cette absence il n’y a rien à aimer. Ce qui est terrible, c’est que si, dans ces ténèbres où il n’y a rien à aimer, l’âme cesse d’aimer, l’absence de Dieu devient définitive. Il faut que l’âme continue à aimer à vide, ou du moins à vouloir aimer, fût-ce avec une partie infinitésimale d’elle-même. Alors un jour Dieu vient se montrer lui-même à elle et lui révéler la beauté du monde, comme ce fut le cas pour Job. Mais si l’âme cesse d’aimer, elle tombe dès ici-bas dans quelque chose de presque équivalent à l’enfer. »

— Simone Weil, Attente de Dieu (1942), éd. Seuil, coll. « Livre de vie », 1977, p. 81


« Le mot de révolution est un mot pour lequel on tue, pour lequel on meurt, pour lequel on envoie les masses populaires à la mort, mais qui n’a aucun contenu. »

— Simone Weil, Réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale (1934), éd. Gallimard, coll. « Folio essais », 1955 (ISBN 9782070404421), p. 39
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Bibliographie

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